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Déclaration des biens immobiliers: les dessous d’un raté fiscal

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Un fiasco? La nouvelle campagne de déclaration des biens immobiliers pour les particuliers est en tout état de cause loin d?être un succès. Fin juin, seulement 61 % de déclarations ont été déposées et l?administration fiscale en attend 24 millions de plus. Les services des impôts sont surchargés par les requêtes et questions des contribuables. Le syndicat Solidaires-finances publiques dénonce un engorgement des centres et pas moins de 94.000 appels ont été enregistrés le 16 juin via le numéro national. À tel point que la Direction générale des finances publiques a décidé de décaler la date limite de cette déclaration au 31 juillet, «compte tenu de l?afflux de déclarations en fin de période».

Pour rappel, la taxe d?habitation a été supprimée pour tous les ménages depuis le 1er janvier 2023, mais continue de s?appliquer aux résidences secondaires et autres locaux vacants. Tous les propriétaires doivent ainsi déclarer en ligne, pour chacun de leurs biens, à quel titre ils les occupent mais également l?identité des occupants. Une nouveauté qui a pu être source de stress et d?incompréhension chez certains Français. Francine, jeune retraitée, s?est sentie perdue: «Je ne savais pas trop où aller pour le faire? Avant je faisais tout par papier, là on était un peu perdu», déclare-t-elle.

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Pour Emmanuel de Crouy-Chanel, professeur de droit à l?université de Picardie Jules-Verne, les difficultés face à cette déclaration sont loin d?être une surprise. «Une nouvelle obligation administrative doit s?inscrire dans un processus d?habitude», explique-t-il en prenant l?exemple de la mise en place de l?impôt sur le revenu dans l?entre-deux-guerres. L?administration a dû redoubler d?effort pour que cette déclaration s?inscrive dans les m?urs.

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Réticences à transmettre l?identité des occupants

Les Français ne sont pas de mauvais contribuables en soi, «c?est l?image qu?ils se donnent, mais quand on regarde les statistiques, en termes de déclaration, cela fonctionne bien», soutient le professeur. Et pour cause, 57 % des Français estiment que payer ses impôts relève d?un «acte citoyen», d?après la consultation en ligne «En avoir pour mes impôts» menée par le gouvernement. Dans le cas des biens immobiliers, il aurait été peut-être alors plus simple, d?après lui, d?ajouter des éléments dans la déclaration de revenus comme avec la redevance télé, plutôt que de recréer une nouvelle déclaration. «La démarche historique est de partir de ce qui existe et d?y ajouter des éléments supplémentaires, pas d?accumuler les nouveautés», ajoute-t-il.

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Il y a eu peu de communication sur le pourquoi de cette obligationPauline Mosset, avocate chez CMS Francis Lefebvre

Cette déclaration n?est pourtant «pas si compliquée», estime Pauline Mosset, avocate chez CMS Francis Lefebvre. «Mais il y a eu peu de communication sur le pourquoi de cette obligation», ce qui a pu interroger et inquiéter certains sur son objectif, confirme l?avocate. «Je me demande si on ne va pas venir nous majorer nos impôts», s?interroge effectivement Francine. Le fait de communiquer des données personnelles, comme l?identité des occupants des biens, cause également des réticences. «On multiplie les éléments d?incertitude», renchérit Emmanuel de Crouy-Chanel.

Des informations supplémentaires sont demandées dans le formulaire, alors que leur transmission n?est pas obligatoire. «Le côté facultatif n?est pas précisé», ajoute l?avocate. Il est par exemple demandé (facultativement) à un propriétaire de déterminer la valeur locative de son bien – même s?il n?est pas loué. «Vous imaginez bien la complication que cela génère», déclare le juriste.

Manque de communication

Au-delà du fond, se pose un problème de forme. La déclaration s?est faite en ligne, sans véritable alternative, alors que les personnes âgées – qui détiennent en grande partie le patrimoine immobilier – ont encore pour certaines l?habitude des déclarations papier. «Ceux qui n?avaient pas internet, qui n?y arrivaient pas ou n?avaient pas de compte sur la plateforme ont été obligés de se déplacer dans les centres», déclare Damien Robinet, secrétaire national de Solidaire-finances publiques. Aucune version papier n?ayant été prévue, des modèles différents de déclaration ont été conçus entre les départements, semant un peu plus le trouble.

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La communication de cette nouvelle obligation s?est également faite par mail ou sur les réseaux sociaux. Les administrés n?ont pas reçu de courrier papier à ce propos: «Je l?ai appris par une voisine, et au début on se posait la question de savoir si c?était vrai», explique Francine. «Moi, c?est le mail que j?ai le sentiment de ne pas avoir reçu», dit de son côté Nicolas, un cadre dynamique, qui fait partie de ceux qui n?ont pas rempli les informations demandées.

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Quant aux données déjà saisies, elles comportent parfois des erreurs, notamment sur la surface habitable. Les particuliers se sont précipités sur la messagerie sécurisée des impôts et dans les centres. Les situations particulières de certains administrés, comme ceux disposant de SCI, et le manque d?explication ont «contribué à ce flot de questions logiques», confirme Damien Robinet. D?après lui, «on arrivera difficilement à 100 % de déclarations, le décalage d?un mois est un pansement sur une jambe de bois».

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