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«Ça fait longtemps que je ne regarde plus»: les petits porteurs désabusés par le bitcoin
Le bitcoin a-t-il perdu de son sexe-appeal auprès des petits porteurs? Il semblerait que oui. Passée l?euphorie de 2021, qui a vu le grand public se jeter sur la star des cryptomonnaies, puis l?effondrement du marché en 2022, pendant lequel beaucoup d?investisseurs ont perdu leurs économies, le soufflé est désormais retombé. «C?est presque un non-sujet pour les clients», confirme Jérôme Rusak, fondateur du cabinet de gestion en patrimoine L&A Finances. Très peu nous en parlent. La plupart ont acheté au mauvais moment, comme beaucoup de monde. Maintenant qu?ils se sont pris un revers, ils sont en mode ?wait and see? s?ils en détiennent encore.»
Les épargnants ont de quoi être désabusés, car les mauvaises nouvelles se sont accumulées ces derniers mois. Après avoir vu sa valeur presque quintupler entre 2019 et 2021, la reine des cryptomonnaies a perdu près de 70 %, dans le sillage de l?effondrement de la plateforme Terra, puis de la faillite du géant américain FTX. Tout l?écosystème crypto a été ébranlé. Le bitcoin, qui a chuté à près de 15.000 dollars, a ensuite repris des couleurs. Il navigue aujourd?hui autour de 30.000 dollars. Malgré ce regain de forme, les particuliers ne semblent pas vraiment vouloir revenir. «Sur 100 clients qui ont investi sur le bitcoin, on en a peut-être 20 % ou 30 % qui en conservent encore. Mais peu sont vraiment actifs», confirme Thomas Roudaut, responsable client premium chez le courtier IG.
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Beaucoup laissent en effet leur portefeuille vivoter. «Ça fait longtemps que je ne regarde plus», raconte Philippe, qui y a placé près de 4 000 euros en 2021. De cette somme, il ne reste plus que la moitié, sans que cela soit forcément un drame. «On a investi comme on parie au casino. Si le cours montait, cela payait les vacances, s?il baissait, ce n?était pas la fin du monde», indique ce banquier qui n?a misé que l?argent qu?il pouvait perdre. Certains continuent à investir, mais l?appât du gain qui les animait il y a encore quelques mois n?est plus là. «De temps en temps, je mets 50 ou 100 euros sur des cryptos. Par exemple, quand j?ai prévu de faire une dépense mais qu?elle ne se fait pas», raconte Marc, qui a perdu des plumes sur des altcoins, des actifs numériques mineurs encore plus volatiles. «Si cela part au tapis, je n?aurai pas de regret. Ce sont des sommes que j?aurais de toute façon dépensées.» Il conserve toutefois son portefeuille de bitcoins, dans lequel il a investi 4 500 euros en 2019. «C?est pour mes enfants, quand ils auront 18 ans. Ces cryptos sont stockées sur une clé numérique. Je n?y touche pas.»
Confiance écornée
Comme lui, certains épargnants caressent toujours l?espoir de voir le bitcoin reprendre du poil de la bête à l?occasion d?un rallye haussier que certains imaginent déjà pour 2025. «Je mets 80 % de mon salaire en crypto», indique Gabriel, stagiaire dans la banque, qui a pourtant déjà beaucoup perdu en 2021. «Mais je vis encore chez mes parents, je peux me le permettre.» Ces profils restent néanmoins rares aujourd?hui. C?est d?autant plus vrai que la confiance dans les plateformes d?échange a largement été écornée ces derniers mois, après la faillite de FTX et les questions récurrentes sur Binance.
La possible arrivée du géant américain BlackRock sur ce marché, qui demande à pouvoir lancer un fonds ETF Bitcoin, est vu comme un signal fort. Certaines plateformes ont connu un sursaut d?achats de bitcoins à cette occasion. «Un ETF peut être acheté sur un compte titre. En termes de démocratisation, cela change tout», rappelle Matthias Baccino, directeur distribution Europe du courtier Trade Republic. De quoi peut-être redonner de l?appétit aux investisseurs particuliers largement mis a mal avec la chute des cours de ces derniers mois.